La désindustrialisation est un fait économique évoqué dans d’abondantes publications. Malgré cet état des lieux préoccupant, le secteur industriel reste un sujet d’espérances économiques pour le citoyen, l’entreprise et la collectivité.
L’auteur propose une note synthétique sur les relations entre l’écosystème industriel et l’intelligence collective ainsi que leurs conséquences.
Interactions
Le tissu industriel est constitué d’un collectif d’entreprises de PME, d’ETI et de multinationales, dont le liant principal est la puissance publique.
La stratégie industrielle hexagonale a toujours axé sa matrice sur la croyance, la volonté ou l’injonction que l’intelligence individuelle devait servir l’utilité commune.
Comme si le développement ou la survie de la communauté nationale en dépendait. Si bien que la responsabilité individuelle attribuée aux capitaines d’industries peut se transformer en une forme de pression ou de charge mentale particulièrement forte.
Elle-même se propage naturellement dans le corps social par le biais des mécanismes du management vertical ou pyramidal adoptés dans la majorité des structures françaises.
Effet de propagation
Cette contagion a pour corollaire une mutation profonde des rapports sociaux entre les collaborateurs et l’entité industrielle ; les risques psycho-sociaux représentent, par exemple, une dimension symptomatique du phénomène.
Pourtant la part de la production industrielle dans le PIB, de l’ordre de 11 %, a été divisée par deux depuis 1970 selon une enquête de l’INSEE sans, pour autant, observer une diminution du stress individuel et collectif perçu.
Pourquoi ?
L’industrie soulève 80 % des investissements en R&D et 75 % des exportations.
Le poids industriel des investissements en recherche et développement et le niveau des exportations représentent des métriques vitales nationales formant, en toute probabilité, le principal de la charge ressentie.
En effet, ces deux indicateurs de performance portent l’essentiel de l’innovation technologique et sociale ainsi que les rentrées en devises à même de garantir le quotidien et de projeter la nation dans le futur.
La puissance, en projet sociétal
La France souhaite compter dans le concert des nations. Pour créer de la valeur ajoutée globale, la mécanique industrielle est devenue une source de rayonnement stratégique.
Avec un pouvoir d’achat et un coût horaire du travail élevés, l’Hexagone ne peut effectivement pas se permettre d’actionner le levier du prix pour résilier ou créer de la valeur, contrairement à d’autres nations.
Pour pallier au dumping social et contrer les risques protéiformes, l’irrigation des ressources industrielles aux autres composantes de l’économie s’est déployée.
Par exemple, les masses financières transférées dynamisent mécaniquement l’amorçage de projets risqués dans le numérique, la robotique, l’intelligence artificielle, les objets connectés, la santé, les énergies renouvelables ou la ville intelligente.
Les activités du secteur primaire et secondaire ont contribué essentiellement à la naissance des mastodontes du secteur tertiaire.
Plus précisément, les chiffres d’affaires de Total, Engie, Air liquide, ArcelorMittal, Renault, Peugeot, Airbus, etc. ont propulsé, de manière directe ou indirecte, les développements de Capgemini, Atos, BNP Paribas, Société générale, etc. jusqu’aux start-up.
Ces segments d’activité sont des vecteurs de croissance et d’espoir selon les tendances détectées dans l’étude prospective « Earth 2050 » de l’entreprise Kaspersky, et celle de l’organisation publique CEPII – centre d’études prospectives et d’informations internationales.
L’action industrielle, malgré la désindustrialisation relative au cours du temps, développe la tertiarisation de l’économie.
Le collectif industriel et la valeur
Dans un environnement mondial volatil, interconnecté et ultra-concurrentiel, la bataille se joue sur le partage ou la captation de cette valeur créée.
Autrement dit, le destin de la communauté nationale, symbolisé par l’intelligence collective, est fonction de la bonne santé financière des écosystèmes ou essaims industriels et inversement.
Cette configuration singulière, découlant d’un choix de société, rend complexe, voire impossible, toute réduction de la pression sur les industriels.
Toutefois, les évolutions des technologies et des modes de vie accélèrent la métamorphose de leurs activités traditionnelles ; offrant l’opportunité d’échapper au déclin industriel annoncé et aux impacts socio-économiques associés.
Ils désirent remonter la chaîne mondiale de valeur, en intégrant les activités servicielles à forte potentialité.
Ce processus socio-technique en marche est-il la clé d’une réindustrialisation ?
L’industriel mute-t-il en une entité hybride ? Quel serait alors le rôle de l’intelligence collective pour impulser la création de cette nouvelle filière combinatoire ?