Qui est CNP Assurances ?

Qui est CNP Assurances ? Comment se positionne-t-elle ? Quelle est sa fonction utilité ? Perspectives et prospectives sur le terrain de la puissance publique.

Toute la nuit, la lumière des bureaux restera allumée. Quelques agents de la fonction publique peaufinent un récital technique à présenter aux investisseurs, la veille des hostilités.

On compte. On recompte. Tout y est, même quelques prédictions hasardeuses sur les évolutions technologiques du secteur, histoire de communiquer.

Les éléments de langage ont été malaxés par nos fins limiers, pour la grande messe.

Avant un mariage, on fait comme tout le monde : on rencontre et on séduit en essayant de présenter ses plus beaux attributs. L’institution en dispose.

Les mots « juste », « protège », « avenir », « chacun », un ensemble rhétorique vital pour le puissant assureur public, n’ont pas été omis des documents, après moultes contrôles.

Le téléphone n’arrête pas de sonner ; les gens de la Caisse des dépôts et consignations, les propriétaires des lieux, veillent au grain en mettant une pression mémorable.

C’était le temps d’une croissance économique heureuse ; nos fonctionnaires, travailleurs de l’ombre, toujours sérieux, sont fiers, optimistes et un tantinet orgueilleux.

Il faut les comprendre ; l’affaire est grave, les bijoux de la République sont en jeu.

L’ambiance est électrique, nul ne souhaite passer à côté de l’opportunité : un formidable pont pour s’ancrer dans la modernité.

Peut-on passer à côté du progrès inéluctable lorsque tout pousse vers ce sens ? Que mijotent-ils si tard dans la nuit ?

Et, il faudra bien leur montrer à ce secteur privé arrogant que la fonction publique s’y connaît en joyeuseté financière et croit fermement au futur.

Avant cet événement historique, il aura bien fallu batailler face aux inquiétudes légitimes des tenants du pur sang de l’intérêt commun ; attention, la maison regorge de sceptiques et de systèmes argumentaires contradictoires.

La mutation est une idée utile et stimulante, une pratique plus délicate à déployer car source d’anxiété existentielle.

Quel est donc ce jour à marquer d’une pierre blanche ?

Le lendemain, le 6 octobre 1998, date d’une révolution assurantielle ; CNP Assurances s’offre, en partie, au marché boursier.

La jolie mariée du service public en Bourse ? Qui l’eût cru dans une France en proie au doute éternel malgré l’embellie économique du moment ?

Débroussailler la jungle de l’assurance et apporter un service utile au consommateur, promesse jurée de l’assureur, chuchotée aux représentants de la force publique – l’actionnaire de référence.

Après l’introduction boursière réussie, les années passèrent à consolider, structurer, organiser et transformer des métiers alors que la pression des besoins s’accentuait dans la société.

36 millions d’assurés réclamant la personnalisation et l’attention à leur situation assurantielle, il faut bien les assumer ; compliqué de compléter la Sécurité sociale.

La confiance léguée à l’assureur CNP Assurances est loin d’être négligeable et le défi complexe, presque surhumain pour des Français culturellement grognards, parfois à tort, parfois à raison.

Satisfaire, celui qui est toujours insatisfait ; quelle quête impossible garantissant un travail éternel à l’assureur !

Après l’entrée sur le marché, comment garantir la suite de la promesse, c’est-à-dire la conquête et la satisfaction totale du client, ce Roi-Soleil ?

La technologie sera-t-elle assurée ou réassurée le contrat de CNP Assurances souscrit auprès de la communauté  d’utilisateurs ?

Saut technologique ou mimétisme technique

Assurtech et fintech, ces mots-valises classifiés buzzword, au centre des conversations de CNP Assurances, symbolisent les ambitions en innovation technologique et sociale de la structure française.

Telle une volonté sémantique de se propulser dans l’avenir malgré un présent pétri d’incertitudes.

À proximité d’un cinéma, du music-hall Bobino, du Théâtre de la Gaîté et sous l’œil bienveillant de la Tour Montparnasse, le siège de l’organisation s’inspire intensément d’idées culturelles et de projets commerciaux, plus ou moins aboutis.

Ne soyons pas excessivement sévère, la compagnie publique a réalisé d’importants progrès en 160 ans en se projetant dans la bulle du privé, vecteur à la fois de futur, d’espérances et d’inquiétudes.

Big data, machine learning, intelligence artificielle, objets connectés, réalité virtuelle, etc. ont transpercé, tout en délicatesse, les murs du centre de commandement.

Avec le temps, les mentalités, stimulées par la culture au sein de l’espace public, ont accepté de muter.

Quelle est la proposition de valeur optimale à valider ? Comment prioriser les tâches ?

Combien de temps reste-t-il avant une disruption sérieuse ? Quelle est la tendance à suivre ou à ne pas suivre ?

Dans le tumulte des affaires et des passions parisiennes, le plus délicat reste, désormais, le triage rigoureux de la donnée.

Puis définir un cap réaliste, une cohérence d’ensemble et une vision claire pour rassurer et faire espérer toutes les parties prenantes.

Rien de moins, pour ne pas décevoir.

Tentons une compréhension raisonnable de la jolie histoire de CNP Assurances, inscrite dans le récit national français, avant de s’aventurer dans un avenir probable.

Le passé télescope le présent

CNP est l’acronyme de Caisse Nationale de Prévoyance dont la création officielle remonte à 1959, en pleine période heureuse des Trente Glorieuses suite à la terrible Seconde Guerre mondiale – 1939-45.

En réalité, les premiers signaux d’activité de l’assureur ont été captés dans le courant du XIXème siècle à la remise du rapport administratif mené par la Commission sur l’assistance et la prévoyance publiques le 26 janvier 1850.

À l’époque, sous la Deuxième République, les pouvoirs publics devaient répondre à un besoin pressant de la population en protection sociale ; l’espérance de vie ne dépassait guère l’âge de 43 ans en moyenne constatée.

Maladie, accident, incident, décès, précarité, les malheurs frappaient à tour de bras les consommateurs, pauvres ou riches ; les autorités régissant la cité ne pouvaient rester le regard hagard à admirer ce spectacle tragique.

Dure époque, loin, bien loin des joies culturelles actuelles de la rue de la Gaîté du 14e arrondissement de Paris, à quelques encablures du siège de la future CNP.

Il fallait bien contenir les massacres des aléas de la vie, seuls témoins d’un réel égaré.

D’autant que les drames du vivre-ensemble généraient de la tension sociale et l’instabilité ; la santé publique devait donc amortir les chocs, compenser l’impardonnable, faisions-nous encore l’hypothèse.

Pourquoi alors ne pas créer une forme de caisse nationale de la prévoyance permettant d’apporter une solution partielle d’apaisement public ?

En s’appuyant sur la Caisse des dépôts et consignations (CDC), bras armé financier de l’État, l’administration a décidé la fondation de trois caisses, chacune spécialisée dans un segment d’activité : épargne-retraite, décès et accident.

Progressivement, les logiques de fusions, de masse critique et de rationalisation des actions ont engendré un rassemblement de l’ensemble sous la houlette de la compagnie CNP Assurances, détenue par l’État-actionnaire.

En conception et en distribution de contrats d’assurances de personnes, l’efficience reste de rigueur car les besoins sont énormes et l’activité sensible.

Depuis, CNP Assurances a élargi naturellement le spectre des actions assurantielles et financières pour coller l’offre à la demande.

Difficile de nier que le marché de la douleur et de la souffrance humaine dispose de particularités complexes, souvent paradoxales.

Les affaires décollèrent rapidement et l’assureur a su se rendre indispensable.

Deux siècles plus tard, au milieu des bruits, le juste équilibre reste le défi éthique et moral le plus délicat.

Résultats au forceps 

Désormais, CNP Assurances est une société anonyme (SA) régie par le Code des assurances, chapeautée par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, et cotée à la Bourse de Paris.

32 milliards d’euros en chiffre d’affaires par an, 36 millions d’assurés, 325 milliards d’euros en gestion d’actifs et 4.700 salariés en moyenne représentent l’ensemble numéraire de l’assureur.

La compagnie distribue essentiellement des produits en assurance-vie, assurance emprunteur, complémentaire santé, épargne-retraite et en prévoyance.

L’activité en gestion d’actifs a pris une dimension centrale dans le business model et dans la génération de revenus récurrents.

Les stratèges étatiques ont parié sur le développement des segments d’activité via une distribution en marque blanche des produits par un écosystème de partenaires – banques, assureurs, mutuelles, courtiers, entreprises, etc.

Autrement dit, l’entreprise conçoit et industrialise des services pour le compte de distributeurs permettant ainsi de réduire son exposition aux risques par la diversification tout en optimisant les ventes.

Concevoir pour autrui apporte un effet de levier puissant qu’on peut observer dans le nombre de salariés, assez faible, chez CNP Assurances à comparer aux assureurs de dimension équivalente – ex. AXA plus de 80.000 salariés et 4.700 pour CNP.

L’énergie vitale de l’assureur est tirée d’un double partenariat, d’une part du fleuron public La Banque Postale (Groupe La Poste), d’autre part, de la Caisse d’Épargne (Groupe BPCE).

Pour diminuer la dépendance à ces deux agents économiques de poids, le management a tricoté un réseau de distribution en propre via le programme Amétis et autres tissages commerciaux.

Bien entendu, le marché domestique français est la pierre angulaire des affaires de CNP Assurances même si l’institution s’essaie à l’international ; Brésil, Portugal, Italie, Argentine, etc.

Elle s’est rapidement rendu compte que chose est complexe de voyager hors de l’Hexagone en matière d’assurances, pour en tirer une rentabilité suffisante.

Sortir de son écosystème naturel exige une période d’acclimatation et d’adaptation, relativement longue ; l’apprentissage culturel peut apparaître délicat.

En 2014, elle a, par exemple, décidé de ralentir l’aventure espagnole en cédant sa participation de 50 % dans CNP Barclays Vida Y Pensiones.

Les liens avec les autorités et les intérêts privés locaux sont également moins naturels qu’en France.

L’homogénéité fonctionnelle, culturelle et réelle des espaces géographiques prendra du temps ; l’innovation, elle, avance plus vite.

Défi robotique

Inutile de nier les évidences si l’on souhaite prendre des décisions stratégiques et raisonnables.

Même sans robotisation, une institution publique survit à l’écosystème ; la raison de la force en place prime toujours.

Prenons l’hypothèse probable que l’assureur CNP Assurances s’immerge dans le jeu de la concurrence saine en réduisant la couverture et les avantages fournis par les administrations publiques.

Dans ce cadre, la résiliation et la résistance à un environnement métamorphosé, peu à peu, en un champ de robots intelligents, passeraient par une transformation mentale et technologique des pratiques des éléments composants la structure organisationnelle.

La règle du jeu est tautologique mais implacable, à bien des égards, lorsqu’on est confronté au monde réel.

70 % des consommateurs indiquent, dans nombre d’enquêtes d’opinion, souhaiter un robot-conseil pour les accompagner automatiquement dans leurs recherches de solutions financières.

Qui pourrait refuser l’aide à la décision d’une machine intelligente répondant 24 heures sur 24 à ses désirs financiers ?

Les biais cognitifs des conseillers ? Les humeurs de conseils mal avisés ? L’attente interminable au téléphone ou par courriel ?

Tout cela serait réduit à néant par la magie machinale ?

Des montagnes de tracasseries subies, générant du stress et de la perte de temps à des consommateurs connectés et exigeants, bientôt de l’histoire ancienne avec l’émergence de robots humanoïdes ?

Gérer, au même instant, des millions d’assurés de A à Z, de la fabrication du contrat personnalisé à une relation clientèle individuelle accompagnée, avec une intelligence artificielle ?

Risques ou opportunités ? Réalité ou virtualité ? Science ou science-fiction ?

Par peur du déclassement et par prudence, de nombreux bancassureurs ont déjà adopté des solutions de tests tous azimuts.

Les assureurs japonais, les plus en pointe, Fukoku Mutual Life Insurance Co, Nippon Life Insurance Co et Meiji Yasuda Life Insurance Company – plus de 110.000 employés cumulés n’ont pas hésité à transformer l’essai en substituant, une partie des effectifs, par des robots automatiques.

Sans oublier le géant bancaire nippon Mizuho – 56.000 salariés, 900 agences – qui a adopté la solution d’humanoïdes pour l’accueil en agence physique – un bot dialoguant intelligemment avec les clients, tout en apprenant artificiellement de ses erreurs chaque jour.

En France, Natixis Assurances (Groupe BPCE) fait des tests d’apprentissage en utilisant les robots de l’entreprise Owi sur plusieurs segments d’activités – la gestion de mails automatisés, conversations, etc.

Le système d’intelligence artificielle Watson de la multinationale américaine IBM séduit un nombre important de structures dont le Groupe Crédit Mutuel-CIC dans le domaine du dialogue automatique.

En Grande-Bretagne, l’établissement bancaire RBS – The Royal Bank of Scotland, encore sous le choc de sa faillite évitée lors de la crise des subprimes – a pris la décision stratégique de remplacer, progressivement, des centaines de conseillers en placement et en investissement par des applications d’intelligence artificielle.

Des centaines de projets concrets et palpables, de part le monde, ont été initiés et accélèrent à un rythme phénoménal jusqu’à inquiéter certaines autorités – le Parlement européen entre autres – qui espèrent légiférer et taxer les robots.

Gadgets algorithmiques ou utilités mécaniques ?

Peut-on raisonnablement freiner le progrès scientifique, partout ?

Les études les plus sérieuses s’accordent sur 30 % d’effectifs en moins, en moyenne, dans le secteur de la banque et de l’assurance à horizon de 10 ans.

Lorsque l’on sait que 65 %, en moyenne, des coûts d’une banque se concentrent dans la masse salariale et les réseaux d’agences, on comprend aisément le potentiel économique et on mesure aussi les risques de casse sociale.

La probabilité est forte, au regard de l’ambiance et du climat d’affaires, que la course à la productivité maximale et au rendement n’est pas prête de ralentir.

Chaque joueur de l’échiquier économique affûte ses outillages, affine son capital humain augmenté dans un contexte d’une métamorphose globale des modèles sociaux-économiques.

L’ajustement stratégique, orienté utilisateur et performance technologique, guide tous les mouvements dynamiques en temps réel.

20 ans après l’introduction boursière, nos fonctionnaires n’ont plus besoin de laisser les lumières ouvertes la nuit durant pour ajuster des stratégies, le système algorithmique se charge de l’ensemble, presque automatiquement.